Centres-villes en péril

Centres-villes en péril

Vous l’avez peut être vu ou entendu, le coup de gueule de ce jeune boulanger qui a créé le buzz hier sur Facebook (à regarder ici : voir la vidéo). Depuis un moment je voulais vous parler de ce mal qui touche nos provinces : la dévitalisation commerciale des centres villes des petites et moyennes villes. Ces lieux qui sont la France, cette grande terre rurale. En voici l’occasion. On pourrait en écrire des pages, le sujet est si vaste.

Derrière ce buzz, l’état d’une partie du territoire interroge. L’état des centre-bourgs que années de politiques ont abîmé, saccagé, rendu à l’état de villes mortes, au profit des zones périurbaines. Le phénomène touche autant des communes de 15 000 que de 100 000 habitants. Les exemples existent à la pelle. Béziers (25% de vacance commerciale), Saint Etienne, Châtellerault, Le Havre, Mulhouse, Calais… En faire la liste paraîtrait sans fin. Aucune région n’échappe aux commerces vides et à la disparition des emplois de proximité. Les élus politiques sont face à une vérité qu’ils ont en partie enfantés.

40 ans de politique ont transféré le commerce en périphérie sous la forte poussée des enseignes de grande distribution

En partie seulement. Sous la forte poussée des enseignes de grandes surfaces, on a laissé fleurir des zones commerciales aux périphéries. Le Graal du tout-sur-place, aux loyers moins élevés (ce qui n’est pas vrai pour les centres commerciaux où des loyers plus élevés sont justifiés par la masse de visiteurs). Petit à petit, les populations ont suivi. A la recherche de plus d’espaces, les habitants ont pris leur habitudes dans le regroupement de l’offre (parking, enseignes, nourriture) proposé par des centres commerciaux qui muent et tentent de réinventer la rue marchande. Les centres populaires, vivants, commerçants, eux… se sont progressivement paupérisés. Seules de très grandes villes y échappent : Paris, Lyon, Bordeaux, pour ne citer que ces exemples.

La palme de l’ironie revenant à la GMS qui cherche à revenir plus fort dans nos cœurs de ville après avoir largement initié le mouvement contraire. Non contente de s’installer dans tous les grands centres commerciaux qui s’ouvrent, la voici aux aguets de toutes opportunités pour implanter leur petites surfaces. Sans états d’âme pour les commerces alentours.

Face à ce mouvement, la proximité doit s’organiser et prendre son destin en main. On doit intégrer la démarche du consommateur. La poussée du commerce sur Internet et du mobile l’a habitué à accéder à tout sans bouger du canapé. Les réseaux sociaux lui offrent même un semblant de vie sociale. Nouvelles technologies, nouvelles générations. Chacun a son avis, tous doivent faire avec. Pas évident lorsqu’on est indépendant mais vital pour nous. Vital si l’on ne veut pas vivre dans des villes fantômes ou au mieux, des villes musées (pour celles qui disposent d’un patrimoine, fut-il entretenu).

La palme de l’ironie revient à la GMS qui a initié cet état sur le territoire et cherche désormais à revenir plus forte dans nos cœurs de ville

Le sujet est aujourd’hui sur la table. Dans les priorités des CCI, des municipalités ou collectivités. Parmi les problèmes à traiter chez les élus politiques, qui peinent à trouver des réponses… Parce qu’il n’y a pas de solution miracle et rapide à 40 années de mouvement. Parce que ce dossier est traité de manière disparate, et qu’on ne sent pas une conviction démentielle au plus haut niveau d’un Etat qui a même supprimé ce qui fut le secrétariat d’Etat aux PME, artisans, commerçants. Ces catégories dont nous faisons partie et se sentent les mals-aimées de la République.

Pourquoi je vous parle de ça ? Parce que les commerces qui sont encore dans ces centres-bourgs se sont les buralistes, des boulangers, quelques cafés, des bouchers et des activités de proximité dont beaucoup peinent à voir un horizon à plus de 2 ou 3 ans, tout au mieux. Notre profession a un rôle à jouer, auprès des collectivités, des élus locaux, pour porter l’offensive en faveur du commerce de proximité. En agrégeant des collègues commerçants. Le commerce appelle le commerce qui appelle la consommation nous le savons bien.

Mais comment lutter face aux mastodontes de la grande distribution ou au rouleau compresseur Internet ? Quand on ne peut affronter un problème de face, on le contourne, on cherche ses faiblesses. L’un de nos défis, en plus de nos propres problématiques (et elles sont nombreuses et loin d’être neutres, sans jeu de mots) sera celui là. En ligne de fond, c’est le monopole, la valeur de nos fonds et notre maillage territorial qui sont en jeu. Prenons l’initiative ! A l’heure du Made in France, du consommer local, du bio, des circuits courts, du télétravail et des problèmes écologiques, nous sommes une solution. A l’heure où le consommateur se fait regardant sur la qualité et où la confiance humaine redevient essentielle, nous avons des réponses à apporter. Nous les petits commerces, nous les buralistes.